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Le Didi Club
27 février 2008

Alexandre Yersin et la peste

II-Yersin et la peste.

    Yersin aurait poursuivi nombre d' explorations s'il n'avait été mandé en 1894 par le gouverneur général d' Indochine et l' institut Pasteur de se rendre à Hong Kong pour étudier l ' épidémie de peste qui ravageait alors la Chine.

    En effet quand yersin arrive en Chine , la peste sévit depuis 1891 , cette peste dite océanique  se répandra par voie maritime sur tous les continents et fera plus de  12 millions de victimes jusqu'en 1948.

 

    Alexandre Yersin se rend donc le 15 juin 1894 à Hong Kong au nom de l' institut Pasteur. Malheureusement une mission japonaise bien mieux équipée que lui et menée par Kitasato , élève de l'allemand Robert Koch,est déja présente. Appréciée des anglais cette mission a accès à l' hôpital  et peut librement observer les malades et autopsier les cadavres.Pour sa part, A.Yersin  est exclu des recherches et est interdit d'approcher les cadavres.Pour faire face à sa situation difficile et précaire, il se fait construire près de l'hôpital  une paillote qui lui servira à la fois de logement et de laboratoire.

 

    Pour faire ses études,  il lui faut des cadavres: c'est pourquoi il passe au delà des interdits anglais. Avant d' être enterrés, les cadavres sont déposés quelques heures dans des caves , déjà installés dans leur cercueil et recouverts de chaux. C'est durant ce court laps de temps que A.Yersin décide de récupérer sur les cadavres des bubons  qu'il étudie aussitôt au microscope dans son laboratoire. Il espère en effet trouver le bacille responsable de la peste dans les bubons; stratégie tout a fait différente de celle de Kitasato  qui  fait ses recherches dans le sang.
    Le choix de  Yersin s'avère  payant: l' analyse microscopique des bubons pesteux  lui montre immédiatement la présence de microbes : « ce sont de petits bâtonnets trapus aux extrémités arrondies et assez mal colorés ». Il les retrouve  par ailleurs dans les ganglions lymphatiques et la rate.
    Il lui reste à prouver que ce microbe est effectivement responsable de la peste. Il innocule alors à des souris  du pus extrait des bubons pesteux. Bilan de l' expérience: « Il [le bacille] tue les souris, les cobayes avec les  lésions de la peste ».Pour Yersin: « il n'y a pas de doute. » .Il envoie alors son rapport à l'Institut Pasteur ainsi que des pipettes contenant du pus des bubons. Sa découverte est alors confirmée par E.Roux. Son rapport est lu le 30 juillet 1894 par l'Académie des sciences,et est publié en septembre dans les Annales de l'Institut Pasteur.
    Il aura fallu trois semaines à Yersin pour découvrir le bacille de la peste qui portera son nom: Yersinia Pestis. Il est tout de même appelée par certaines personnes le bacille Kitasato-Yersin.

    En outre, A.Yersin constatant la multitude de cadavres de rats jonchant les rues de HongKong, déduisit aussitôt que les rats étaient responsables de la transmission du virus a l' homme. Hypothèse qui fut rapidement confirmée  par l' analyse de quelques un de ces cadavres contenant effectivement le bacille.
    L' année suivante, il retourne à paris  et met au point avec Albert Calmette et Emile Roux  un sérum contre la peste. Celui-ci est obtenu par l' injection à des chevaux du bacille de yersin qui provoque la sécrétion dans le sérum sanguin du cheval d'anticorps. Le cheval est alors saigné afin de récupérer le sang puis le sérum par filtration.L'injection de celui-ci entraine chez le malade la destruction des bacilles pesteux.

    Alexandre Yersin part à Canton tester  son sérum, mais  face à l'hostilité de la population il est obligé de renoncer. Heureusement, l' évêque de la Mission Catholique lui demande de soigner un de ces élèves promis a la mort. Quelques injections du sérum amènent rapidement sa guérison: le sérum est un succès.  Il l' expérimente ensuite à Amoy ou il parvient à guérir une vingtaine d'individus malades .Mais l' année suivante en 1897, la peste éclate à Bombay. Il s' y rend avec des stocks antipesteux, mais les résultats des injections sont particulièrement décevants. Il est ensuite relayé par Paul-Louis Simond qui mettra plus tard en évidence  le rôle de la puce dans la transmission de la peste.

Ci-dessous une lettre plutot amusante de Yersin à sa mère alors qu'il était à Hong KOng:


Hong Kong 1894

Chère maman,

 

Je suis sûre que tu dois être un peu anxieuse de recevoir cette lettre, me sachant dans un endroit où l'on n'irait pas précisément faire aujourd'hui un voyage d'agrément!

Après être resté quelques jours à l'hôtel, je me suis fait construire une paillotte à côté de l'hôpital des pestiférés et j'ai établi là mon domicile et mon laboratoire.

Tout cela n'a pas été sans peine et si je n'avais pas eu le bonheur de découvrir un brave missionnaire catholique qui a bien voulu m'accompagner partout et me servir d'interprète, je ne sais pas comment je me serais tiré d'affaire! Le missionnaire s'appelle le père Vigano; Voilà 30 ans qu'il réside à Hong Kong aussi il connaît tout le monde.

J'ai déjà pu étudier une douzaine de cas et il ne m'a pas été difficile de retrouver le microbe qui pullule dans le bubon, dans les ganglions lymphatiques, la rate etc. C'est un petit bâtonnet un peu plus long que large et qui se colore difficilement. Il tue les souris, les cobayes avec les lésions de la peste. Je le retrouve toujours; Pour moi il n'y a pas de doute.

J'envoie à l'institut Pasteur par ce courrier un certain nombre de petits tubes scellés contenant de la pulpe de bubons de peste. On va pouvoir donc commencer à Paris l'étude de la maladie. Ici je suis très limité dans mes expériences car mon laboratoire est fort mal monté.

Hong Kong est une ville très pittoresque, bâtie au bord de la mer sur le flan d'une montagne abrupte de 600 mètres, les maisons sont étagées jusqu'au sommet. La population chinoise est de plus de 200 000 âmes. Elle est aujourd'hui réduite de moitié à cause de l'émigration provoquée par la peste. On est en pleine saison des pluies, il tombe de vrais déluges d'eau et à la suite de chacune de ces violentes averses, il y a un redoublement de l'épidémie. La mortalité est très forte, 95% des cas. Jusqu'à présent 3 Anglais seulement ont été frappés. Je ne compte pas les Portugais, il y en a beaucoup plus. Je tâcherai un de ces jours de faire une petite photographie de ma paillote avec moi devant et je te l'enverrai. Je continue à me très bien porter, un peu fatigué seulement, car étant seul je dois suffire à tout.

J'aurais encore bien des choses à te raconter, mais il y a deux cadavres qui m'attendent, et ces Messieurs sont pressés paraît-il d'aller au cimetière. Adieu chère maman, lave-toi les mains après avoir lu ma lettre pour ne pas gagner la peste!!

ton fils aff.

A. Yersin

 


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